16.3.18

Algorave

Le terme « algorave », pour « algorithmic rave », désigne une tendance électronique où les participants codent en direct leurs performances musicales. Ce mouvement peut être perçu comme la rencontre entre la philosophie du hack, la culture geek et le clubbing.


Lors des soirées, les producteurs et le public sont invités à visualiser simultanément le code de la musique jouée, écrit en temps réel et projeté sur un écran géant.


Une vaste communauté, inclusive et transparente, s'est constituée autour du live-coding grâce à l'accessibilité à des environnements en open-source comme SuperCollider, TidalCycles, Gibber, ixi lang et Extempore, développés par les musiciens eux-mêmes.

Le live-coding demeure plus une technique qu'un réel genre musical. Certains l'utilisent pour faire de la musique électro-acoustique plus tournée vers le son que vers le rythme. Dans l'algorave, le résultat couvre tout le spectre de la musique électronique du gabber au drone, du glitch à l'ambient. La scène définit elle-même sa musique comme des sons complètement ou partiellement caractérisés par l'émission d'une succession de conditionnelles répétitives. Et les live-coders y collent des étiquettes aussi diverses que « glitch cellular automata », « algokraut », « ambient gabber » ou encore « datapop ».






Les algoraves adoptent les sons des raves du passé et y introduisent des rythmes et beats étranges et futuristes par la manipulation improvisée des programmes. Le résultat est brut, lo-fi et erratique. Parfois contradictoire, maladroit et incohérent, parfois excitant, imprévisible et captivant.

La diffusion online des morceaux, s'opérant également sous des formats open-source, permet une mise disposition de toutes les informations sur le processus de composition lui-même. Alex McLean de Slub souligne que la programmation a toujours été quelque chose d'élitiste. Mais la facilité d'accès des langages du live-coding permet une pratique collective et en public. On y retrouverait le principe du mouvement punk mais aussi celui de l'impro en jazz. Pour Alexandra Cárdenas, cette pratique est une libération esthétique et technique du consumérisme, en réponse à la lassitude des limitations imposées par les softwares commerciaux.

Travaillant au niveau même de la génération des sons, des notes et des rythmes grâce à l'accès à l'information source, la musique reste nécessairement un ensemble de données dynamiques à traiter et non un simple enregistrement statique. Arrivé à une époque technologique où le processus de composition peut quasiment être pris en charge par des intelligences artificielles capables de générer des mélodies, les programmeurs pourraient bien être les nouveaux les DJs.



Pour approfondir / sources :


ARTE Tracks, Live coding and algorave (2013)
Alex McLean @ TEDx, Algorave: algorithmic dance culture (2017)

19.4.17

Steam Punk

Le terme « steampunk » désigne un sous-genre de la la science fiction ou de la science fantasy qui incorpore des éléments inspirés par la machinerie industrielle à vapeur du XIXème siècle.



Il s'agit essentiellement de fictions spéculatives rétro-futuriste et/ou anachroniques initiées par quelques auteurs, K.W. Jeter, Tim Powers et James Blaylock, et inspirées les pionniers de la SF que sont H.G. Wells et Jules Verne.

L'esthétique se diffusa petit à petit dans toute la pop culture et fit une apparition marquée au sein des amateurs de cosplay et de GN. La mode constitua alors la chaînon manquant entre la littérature et l'émergence d'une réelle subculture.

Des groupes proposèrent alors une traduction musicale des thèmes et de l'imagerie. 

Les antécédents du trope pourraient bien être le psych-pop de Paul Roland ou la SF arty de Thomas Dolby.



Comme leurs homologues auteurs, les musiciens steampunk explorent une sorte d'uchronie à la fois ancienne et anachronique, avec des instruments rétro (violon, violoncelle, banjo, accordéon) mais également des instruments électroniques ou divers éléments évoquant les machines extraordinaires, des inventions délirantes ou la révolution industrielle en général.

Cette sorte de darkwave geeky, qui sert de fond sonore pour des monde fictifs, brasse un très large spectre d'influences : neoclassical, cabaret, swing, barbershop, folk, prog, punk, indus, electro, hip hop, etc

Bien évidemment, les musiciens steampunk portent sur scène des tenues idoines et proposent une scénographie théâtrale, des visuels gothiques ou victoriens, des concerts spontanés et ludiques, et une atmosphère plutôt sombre et grave.

Voici un aperçu non exhaustif :








26.4.17 : addendum sur sur le steampunk en général

Le steampunk apparaît aisément comme une nostalgie d'un passé qui n'a jamais eu lieu, faisant l'éloge des relations sociales victoriennes adaptées à l'ère de l'information. D'autres caractéristiques du postmodernisme y sont également présentes : ironie, intertextualité, pastiche et bricolage.

Le suffixe -punk suggère ici une opposition ou une défiance des valeurs de la culture dominante. Ainsi le steampunk partagerait l'effet cognitif du reste de la science fiction et de la fantasy, par la transposition de luttes de classe actuelles et le questionnement, à l'instar du cyberpunk, du positivisme et la notion de progrès. Il s'agirait alors d'une opposition symbolique à l'obsolescence de la techno-culture actuelle, au rejet de la connaissance du passé, voire au nihilisme et à superficialité du postmodernisme.

Pour approfondir / sources :

Dru Pagliassotti, Does Steampunk Have an Ideology? (2009)
Etienne Barillier, Steampunk ! L'esthétique retro-futur (2010)
Jeff VanderMeer, The Steampunk Bible (2011)
Julie Anne Taddeo & Cynthia J. Miller, Steaming into a Victorian Future: A Steampunk Anthology (2012)
Rjurik Davidson, Mad scientists, airships and class: the politics of Steampunk (2012)

Jeff VanderMeer, The Steampunk User's Manual (2014)

12.6.16

Heavy Mithril

Le terme « heavy mithril » désigne le heavy metal dont les thématiques sont puisées dans la fantasy. Les sources étant les œuvres de J.R.R Tolkien, Michael Moorcock, C.S Lewis ou encore George R.R. Martin.


Le mot « mithril » étant une référence au métal fictif de la Terre du Milieu.

Le heavy metal a toujours raconté des anciennes prophéties et des quêtes épiques. Dès les années 70, la old wave faisait déjà de fréquentes références, directes ou indirectes, à cette tendance littéraire.


Tim Schafer (concepteur de jeux vidéo ex-LucasArts et également auteur de Brütal Legend):
I've always seen this overlap between medieval warfare and heavy metal. You see heavy metal singers and they'll have like a brace around their arm and they'll be singing about Orcs.
Les sous-genres métalliques définissant l'archétype du trope sont principalement le power metal et le symphonic metal, suivis par le viking metal, le gothic metal, le folk metal et le black metal.





Dans What's the connection between heavy metal music, horror and fantasy? (juillet 2013), Ed Grabianowski proposa deux théories pour expliquer la persistance des ces thématiques dans le metal à travers les décennies.
  • La théâtralité de la performance scénique au sein d'un spectacle rock devenant plus grand et plus bruyant aurait induit un changement d'échelle des chansons elles-mêmes. De petites confessions à métaphores cosmiques trouvées dans les livres.

  • Ces récits et leurs mondes offriraient un unique équilibre entre escapisme et catharsis qui permettrait de répondre aux agressions contemporaines par le lyrisme et l'imagination et non par une simple restitution de violence.


Et maintenant, branchez vous sur Radio Rivendell

Pour finir, un petit montage mariant avec justesse Westeros et hard rock, avec un doux parfum 90's


6.6.15

Geekopolis 2015

Geekopolis se présente comme le festival des cultures de l’imaginaire. Pour la troisième année, y ont été accueillis des exposants, ateliers, conférenciers et concerts autour de la fantasy, du steampunk, de la science-fiction, de la culture japonaise et des jeux de rôles.


Par rapport à d'autres élèvements qui se révèlent n'être que des vitrines de promotion géantes pour les gros éditeurs, Geekopolis met plutôt l'accent sur les structures indés, des artisans, des associations, des fanclubs.

La présente note revient sur les manifestations musicales.
- chorale a capella
 
- covers de musiques vidéo-ludiques
 
- rock zombie
 
- musique rôlistichaotique
 

Egalement des chansons rétro-futuristes ou encore musiques médiévales ; sans captation pour l'instant.

19.1.15

Bill Bailey

Bill Bailey est un humoriste, acteur et musicien britannique.


En plus de ses stand-up musicaux, il a participé à diverses émissions TV et à la sitcom Black Books, mais demeure méconnu de ce côté-ci de la Manche, malgré ses liens avec la bande des geeks Simon Pegg, Nick Frost et Edgar Wright.

Suivant une tradition toute britannique, il affectionne particulièrement tirades et questionnements surréalistes, pleins de références littéraires, scientifiques et philosophiques. Il évoque fréquemment une pop culture « nerd » : Doctor Who, LOTR, Star Trek, ... et a même présenté un documentaire sur Stonehenge.

Multi-instrumentiste de talent, il jongle avec les styles musicaux (jazz, rock, pop, folk, electro, classique) au sein de sketchs multimédia ou dans ses chansons, dont voici un petit florilège :








13.12.14

Chiptune

Le terme « chiptune » -- ou encore « chip music », « 8-bit music », « gameboy music », « nintendopop », « bitpop » -- désigne une musique électronique produites à partir des puces sonores (sound chips) venant d'ordinateurs, de consoles vidéo-ludiques ou de bornes d'arcades vintages, mais également divers émulateurs.


Les systèmes souces populaires incluent les NEC PC-8801, Commodore 64, Nintendo Entertainment System, Amiga, Game Boy ou encore la Mega Drive.






Initialement ancrée dans la pratique du crack de logiciels, la scène demo produisit, au siècle dernier, des sortes de vidéo clip mettant en valeur les capacités de programmateurs / musiciens / infographistes à travailler avec un matériel informatique restreint. Il se mis en place une communauté internationale, où s'estompèrent les barrières entre auteurs et spectateurs. La chip music adopta cet ascétisme et permissivité technologiques en réaction à la fois à la complexité de l'IDM et aux surproductions de la pop, se présentant comme une sorte de punk électronique.

Dans 8-bit Punk (novembre 2003), Malcolm McLaren déclarait qu'il s'agissait à la fois de la prochaine étape dans l'évolution du rock'n'roll et un antidote à l'electronica moribonde. Les adjectifs utilisés pour décrire ce nouveau genre de folk music de l'age digital, rappellent le piratage contre-culturel auquel il participa: cru, bruyant, inhospitalier, industriel, illégal, périmé, subversif, underground …

The Tank à New York peut prétendre être à la scène que le CBGB fut au punk et à la new wave.

En sortant de la sphère du gaming, les musiciens développèrent des formats autonomes et des technologies permettant une compatibilité avec les paradigmes du rock et de la dance music. Curtis Short, dans son article Modes of Retromania - 8 Bit/Chiptune (1er novembre 2011) argumente que la tendance n'est pas qu'un genre nostalgique de plus. Le changement de contexte et de signification, passant d'une musique utilitaire (fond sonnores/atmosphère pour les jeux) à une musique-en-soi, suit le même schéma que l'introduction de l'ambient et des founds sounds dans le cadre de la pop music.


La chip music tisse d'étroite relation avec le circuit bending qui crée de nouveaux instruments à partir de jouets électroniques, pour des expériences synesthésiques où sons et visuels sont indissociables.

Pour appofondir / souces :

Michael Downes , 8-chip Music (avril 2009)
Kevin Driscoll & Joshua Diaz, Endless loop: A Brief History of Chiptunes (2009)
Ben Greenman, Bleep Bloop: The Charms of Chiptune (21 mai 2013)

ARTE TracksChiptunes, musique et manettes (émission du 24 janvier 2003)
ARTE TracksCircuit bending (émission du 12 avril 2007)
ARTE TracksNintendo Rock (émission du 8 décembre 2011)

Documentaires :

Reformat the Planet (Paul Owens, 2008)
Europe in 8 Bits (Javier Polo Gandía, 2013)

12.7.14

Geek Rock

Le terme « geek rock », ou « nerd rock », n'a été popularisé qu'assez récemment pour désigner une certaine tendance du rock alternatif nord-américain.


Les définitions données par Urban Dictionary et le Rock Comic Con insistent sur le fait que cette étiquette décrit davantage les textes et l'attitude des musiciens plutôt que leur musique. Dans son article What Is Geek Rock? (juin 2014), Victoria Willis expose les critères choisis avec Alex DiBlasi pour leur futur livre Geek Rock: An Exploration of Music and Subculture : des sujets et paroles geeky, des musiciens geeks, une position entre alternatif et mainstream, et des chansons à plusieurs niveaux de lecture.

Musicalement, de nombreuses caractéristiques sont pourtant largement partagées par les geek rockers : une power pop plutôt mélodique, des harmonies vocales fréquentes, et l'utilisation d'instruments non-rock, technologiques (synthétiseurs et claviers électroniques, vocoder, keytar, theremin, samplers) ou folkloriques (accordéon, violon, ukulélé).

Textuellement, les thématiques récurrentes témoignent de diverses formes de marginalité : isolement, solitude, échecs amoureux, ainsi que la fascination pour la science et la pop culture. Au sein de la classe moyenne blanche et masculine des suburbs, les geeks sont bien souvent des « outsiders among outsiders ».

Formellement, les paroles contiennent une importante dose d'ironie et d'humour, cultivant ainsi ce décalage avec les postures habituelles de l'alt-rock post-grunge, plus rockiste et/ou white trash.

Historiquement, les précurseurs et influences se trouvent du côté de la new wave (Devo, Oingo Boingo, Talking Heads et XTC), du college rock (The Feelies, REM, Pixies) et des parodistes comme Weird Al Yankovic.

L'archétype du genre pourrait être ces petits malins de They Might Be Giants :


Voici un aperçu non exhaustif de musiciens « geek rock » ou « nerd rock » :